LA MAÎTRISE
« Ce mot me laisse songeuse. Bien étrange terme
dont notre mental s'empare comme la panacée d'un être spirituel.
Voyons, qu'entends-je par là ? La maîtrise est comprise, toujours
par notre mental en quête de reconnaissance, comme l'apaisement émotionnel.
Elle fait référence au maître, à celui libre
de son psychisme et de son corps, libre même de cette liberté.
Et le mental, par sa hâte coutumière de conclure, pense qu'être
libre de son psychisme c'est être sans émotion. Il a une image
du maître de sagesse. Il en résulte que cette maîtrise
se transforme en contrôle. Notre esprit devient le gestionnaire, notre
corps son obligé, et cela sans en avoir conscience, de telle sorte
que nous en arrivons à dire que maîtriser est l'élément
nous rapprochant de l'état de maître. »
« […] Et cependant, sans nous en apercevoir, en confondant maîtrise
et pouvoir, maîtrise et contrôle, nous nous transformons en manipulateur,
imposant le silence à nos émotions, à notre révolte,
notre colère, nos insatisfactions, nos sautes d'humeur, notre ras le
bol de ce dressage dans lequel nous ne respirons plus. Nous nous enduisons
d'une apparence dont les caractéristiques seront en étroite
correspondance avec ce que nous pensons que nous devrions être car nous
croyons savoir fermement ce que nous devrions être.
Et nous taisons un peu plus chaque jour ce qui se vit en nous sans nous rendre
compte que c'est peut-être, de toutes, la violence la plus intransigeante
envers nous-même. »